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Shakespeare en Serbie avec Voldemort

Article écrit par Nathalie Petrowski et datant du 15 février 2011
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Si Shakespeare vivait aujourd'hui, il aurait fait le voyage jusqu'à Berlin hier pour la présentation de Coriolanus, premier long métrage de Ralph Fiennes, le Voldemort de Harry Potter.

Car même si le vieux Shakespeare n'a pas scénarisé ce thriller politique, même si le film se passe aujourd'hui, dans une ville envahie par les chars d'assaut, des portables, des antennes satellites et des nouvelles continues diffusées sur les bandes passantes des chaînes d'infos, les dialogues ne trompent pas: ils sont de Shakespeare du début jusqu'à la fin.

Tourner Shakespeare dans le texte, dans une ville moderne en guerre, voilà le pari fou imaginé par l'acteur britannique Ralph Fiennes. Le pari n'était pas évident, mais l'acteur devenu réalisateur l'a relevé avec brio, grâce à une mise en scène nerveuse et dynamique, à un scénario efficace de John Logan (scénariste de Gladiateur) et à une superbe brochette d'acteurs dont le beau Gerard Butler de 300, la poignante Vanessa Redgrave, Fiennes lui-même dans la peau de Coriolanus et, dans le rôle d'une militante survoltée, Lubna Azabal, que les Québécois ont découverte dans Incendies.

Coriolanus est l'histoire d'un héros maudit, un général-samouraï qui ne brille que sur le champ de bataille. Poussé par l'ambition de sa mère dans l'arène politique où il échoue lamentablement, il décide de se venger en pactisant avec son pire ennemi et en envahissant la ville qu'il a autrefois défendue. Bref, il est l'équivalent de Wolfe qui se retourne contre les siens et qui passe dans le camp de Montcalm.

Ralph Fiennes a eu l'idée audacieuse de porter Coriolanus à l'écran, il y a 10 ans, en incarnant le général maudit au théâtre, à Londres. «La dernière chose que je voulais faire, c'était un film d'époque de la Rome antique. Sans compter qu'au cours des 10 dernières années, les images que j'ai vu défiler à la télé depuis le 11 septembre en passant par l'Irak et l'Afghanistan m'ont confirmé que Coriolanus est une histoire de maintenant», a-t-il confié en conférence de presse. Pour Vanessa Redgrave, jouer Shakespeare dans le texte devant la caméra ne posait aucun problème. «C'est une langue que je pratique depuis longtemps et qui sort de ma bouche comme si elle venait de moi», a-t-elle dit, pendant que Gerard Butler opinait du bonnet, encore pâmé par cette grande actrice qu'il n'a cessé d'observer pendant le tournage à Belgrade, en Serbie.

Ralph Fiennes a tellement aimé son expérience qu'il rêve maintenant de tourner Cléopâtre, quelque part entre Rome et Le Caire. Il n'a pas encore de scénariste ni de producteur. Seulement un dialoguiste du nom de Shakespeare.

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